Les 35 heures en deshérence même si la durée légale reste

9 janvier 2008

PARIS (AFP) — Les "35 heures", exception française présentée à l'origine comme une révolution sociétale majeure vers plus de temps libre pour les salariés[M1] , risquent de tomber en deshérence[M2]  même si la durée[M3]  légale du travail devrait rester fixée sur ce chiffre[M4] .

Le "oui" de Nicolas Sarkozy à un journaliste qui lui demandait mardi s'il souhaitait que "2008 soit la fin, au moins réelle des 35 heures" a suscité[M5]  une vive émotion, notamment à l'Assemblée, les députés de droite saluant[M6]  les prémisses d'une abolition de toute durée légale du travail, tandis que ceux de gauche dénonçaient la remise en cause [M7] d'un acquis[M8]  social majeur.

Mercredi, le gouvernement a essayé de clarifier son message et de faire retomber la pression. "Il n'est pas question de supprimer[M9]  la durée légale du temps de travail en France", a martelé[M10]  son porte-parole[M11] , Laurent Wauquiez.

"On n'y touche pas, la durée légale restera à 35 heures", a dit dès[M12]  mardi soir Henri Guaino le conseiller spécial du président. Mais, "il sera possible branche par branche, entreprise par entreprise, avec des accords[M13]  majoritaires (...) de déroger à[M14]  cette règle[M15] ".

Ce qui veut dire en clair que le gouvernement "veut vider[M16]  les 35 heures de leur substance", déclare à l'AFP le sociologue Jean Viard (CNRS-Sciences Politiques), auteur de l'ouvrage "Le sacre[M17]  du temps libre, la société des 35 heures".

"S'il autorise les entreprises à déroger à la durée légale du travail par accord d'entreprise, cela signifie non pas que l'on va pouvoir travailler plus -ce qui est déjà possible- mais surtout[M18]  que les heures supplémentaires ne seront plus payées en heures supplémentaires, mais en heures normales", dénonce pour sa part une responsable de la CGT, Maryse Dumas.

"Toute remise en cause des 35 heures signifierait désormais[M19]  une baisse des salaires", renchérit[M20]  l'inspecteur du travail Gérard Filoche, membre du parti socialiste.

"Ce que le président de la République nous annonce en fait, à l'inverse de ce qu'il avait annoncé dans sa campagne[M21] , c'est qu'on va travailler plus, gagner moins et permettre une concurrence[M22]  entre entreprises qui va reposer sur le prix de l'heure de salaire", ajoute Mme Dumas.

Pour Jean Viard, le délitement[M23]  des 35 heures constituerait surtout l'abolition d'un "modèle de régulation du travail" qui favorise notamment la parité[M24] .

"Il y aurait un rapport à faire, c'est celui entre le nombre d'enfants et les 35 heures", souligne-t-il en rappelant que la France est le seul grand pays européen à afficher[M25]  un taux de natalité[M26]  à deux enfants par femme.

M. Viard, qui a travaillé aux côtés du sociologue[M27]  Edgar Morin, auteur du concept de "politique de civilisation" repris par Nicolas Sarkozy, relève des "incohérences" dans le discours[M28]  présidentiel: "On ne peut pas déplorer d'un côté [M29] que personne ne s'occupe plus des enfants", "et d'un autre côté[M30] , dire toujours +travaillez plus+", souligne-t-il.

"Mine de rien[M31] , ce qui se passe avec Sarkozy, c'est l'idéologie du travail masculin qui prend le dessus[M32] ", ajoute-t-il.

Selon cet expert, qui travaille depuis 15 ans sur le sujet, "la seule évolution intéressante à souligner" est que sur une année donnée (2005), 12% des heures totales ont été travaillées en France et 16% aux Etats-Unis, alors que ce chiffre était de 40% en 1900.

"La différence avec les Etats-Unis vient du fait qu'ils ont plus de travailleurs pauvres comptabilisés[M33]  dans les actifs, ce qui augmente le nombre d'heures totales travaillées" souligne-t-il. "Mais l'évolution générale reste orientée vers le temps libre".

Source:  http://afp.google.com/article/ALeqM5iQjJ8wXiXg6zNp_PPtJHbWlVWTkw